21 mars 2019
Reconstituer l’histoire du cerveau pour déceler au plus tôt la maladie

Des chercheurs français et espagnols ont analysé plusieurs milliers d’images cérébrales pour reconstituer l’évolution du cerveau tout au long de la vie et déceler les premiers signes caractéristiques de la maladie d’Alzheimer, dès 40 ans.

La maladie d’Alzheimer se caractérise par une atrophie (c’est-à-dire une diminution du volume) progressive de certaines zones du cerveau, qui entraîne les troubles cognitifs et la perte d’autonomie du malade. Il reste toutefois à déterminer quand et à quelle vitesse cette atrophie apparaît au cours des années, et comment elle se distingue du vieillissement normal du cerveau. Répondre à ces questions pourrait permettre de déceler plus tôt la maladie et d’accompagner plus efficacement les malades.

Une collaboration européenne entre des chercheurs bordelais et espagnols a souhaité reconstituer l’évolution d’un cerveau tout au long de la vie afin de mettre en évidence les différences entre le cerveau d’une personne qui va développer une maladie d’Alzheimer et une personne non malade.

Les chercheurs se sont donc attelés à une tâche colossale : analyser plus de 4 000 IRM de cerveau de sujets sains et malades, âgés de quelques mois à 94 ans ! Pour cela, ils ont pu s’appuyer sur la plateforme volBrain : disponible en ligne pour tous les chercheurs dans le monde, elle permet de calculer en un temps record le volume de chaque structure du cerveau de façon automatique à partir des images IRM.

Un premier groupe de près de 3 000 sujets témoins a permis de décrire l’évolution normale du cerveau au cours de la vie. Un second groupe, constitué de près de 1 500 malades de plus de 55 ans et de près de 2 000 témoins plus jeunes (les chercheurs ne disposant pas d’IRM prises chez des personnes malades avant le diagnostic d’Alzheimer), a abouti à un modèle d’évolution du cerveau « Alzheimer ».

Deux régions du cerveau modifiées autour de 40 ans

Conclusion : l’hippocampe commence à s’atrophier avant 40 ans en cas d’Alzheimer, ainsi que l’amygdale, autour de 40 ans. Ces deux aires cérébrales, connues pour être touchées par la maladie d’Alzheimer, s’écartent de la situation normale plusieurs années avant l’apparition des premiers symptômes.

Les chercheurs ont également constaté un élargissement précoce des ventricules latéraux vers 40 ans, mais celui-ci apparaît également chez les sujets sains après 60 ans. Ils en concluent que le suivi de cette structure cérébrale ne permet pas de distinguer de façon précoce les personnes susceptibles de développer une maladie d’Alzheimer.

En reconstituant l’évolution du cerveau sur plusieurs décennies, cette étude propose donc des indices décelables par une imagerie cérébrale bien avant l’apparition  des symptômes cognitifs. Avec en perspective un diagnostic plus précoce.

Source : Lifespan changes of the human brain in Alzheimer’s disease. P. Coupé, E. Lanuza, J.V. Manjón, G. Catheline. Scientific Reports, le 8 mars 2019.
Image : Jeffrey Hatcher, 2014. Tacking on the Styx. Authorhouse: Bloomington