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La démence sénile, un terme à utiliser avec précaution

« Démence », « Démence sénile », « Démence d’Alzheimer », « Démence à Corps de Lewy »… Tant de termes à bannir ! France Alzheimer vous explique pourquoi ! 

Les termes de « démence sénile » ou « sénilité » sont encore employés de nos jours pour parler de troubles qui seraient communs à toutes les personnes âgées. Ces troubles ne seraient que le fruit, inévitable du vieillissement normal. Qu’en est-il réellement ? 

Certes, prendre de l’âge s’accompagne de désagréments d’ordre psychique et moteur qui n’ont rien de pathologique. Ils résultent simplement du vieillissement cellulaire, de la baisse de l’activité physique et d’autres facteurs contre lesquels il est plus ou moins difficile de se prémunir. Mais ces manifestations normales du vieillissement ne sont pas à confondre avec la démence (démence sénile), qui relève quant à elle du vieillissement pathologique.

S’il convient d’insister sur ce point, c’est que cette conception erronée dissuade de nombreuses personnes et leurs proches de se tourner vers un médecin à l’apparition des premiers symptômes, pensant qu’il s’agit d’un phénomène normal et irréversible. Pourtant, une prise en charge médicale précoce permet d’identifier et de traiter une éventuelle maladie curable à l’origine des troubles avant qu’elle n’ait des conséquences irréversibles. Seul un diagnostic de « démence » posé permet d’entamer un protocole de soins adaptés pour tenter de ralentir la progression d’une maladie, d’en alléger les symptômes et de préparer plus efficacement l’avenir.

alzheimer et démence.

La démence : ce qu'il faut savoir selon l’OMS

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) utilise le mot « dementia  » en anglais. Elle estime que, dans le monde, plus de 50 millions de personnes sont atteintes de « démence », avec près de 10 millions de nouveaux cas chaque année.

Selon l’OMS, ce terme, qui est sujet à de nombreuses confusions et autres emplois abusifs, notamment en France, désigne un syndrome complexe, qui affecte les fonctions cognitives chez un public majoritairement âgé. En France, nous qualifions ce syndrome avec les noms des maladies qu’il peut engendrer comme la maladie d’Alzheimer ou d’autres maladies apparentées.

Contrairement à ce que l’on peut encore entendre au sujet de la « démence », il ne s’agit ni d’une maladie à part entière, ni d’un passage obligé du vieillissement.

Définition, symptômes, cause, traitement et prévention, faisons le point sur la démence et ce qui l’entoure.
[Organisation mondiale de la Santé (OMS) –  Les principaux repères de l’OMS sur la Démence. 20 septembre 2022.]

Qu'est-ce que la « démence » ?

Comme mentionné en introduction, la « démence » n’est pas le nom d’une maladie. C’est un ensemble de manifestations cliniques, autrement dit un syndrome, caractérisé par une altération pathologique des fonctions cognitives comme la mémoire, le langage, le raisonnement, l’apprentissage ou l’orientation. Ces troubles cognitifs sont souvent accompagnés de troubles d’ordre émotionnel et comportemental et affectent le quotidien et l’autonomie de la personne.

Les symptômes de la « démence »

La « démence » peut prendre de nombreuses formes différentes en fonction de son stade d’évolution, de sa ou ses causes et de la personne qu’elle atteint. Il est toutefois possible de définir les grandes lignes de cette affection.

Toujours selon l’OMS, on peut distinguer 3 stades d’évolution dans un cas de « démence » :

  • le stade initial, pendant lequel la personne atteinte commence à manifester des oublis et des difficultés à se repérer dans le temps et dans l’espace. À ce stade d’évolution, l’entourage peut ne pas remarquer que leur proche présente les symptômes d’un début de « démence ». Ces derniers, souvent diffus et encore occasionnels, peuvent être interprétés comme des signes de fatigue ou de stress et ne pas alerter les proches qui les constatent.
  • le stade intermédiaire : les signes cliniques de « démence » deviennent de plus en plus prononcés, et la personne atteinte de ces troubles peut par exemple avoir du mal à se rappeler d’événements survenus récemment ou du prénom de quelqu’un de bien connu, se perdre dans des endroits familiers, manifester des changements de comportement, avoir du mal à communiquer, ou encore présenter une perte d’autonomie dans les gestes du quotidien, sans que cela ne puisse être expliqué par un problème d’ordre moteur.
  • le dernier stade d’évolution de la « démence » : la personne présente des pertes de mémoire majeures et son état général est significativement altéré. Elle peut éprouver d’importantes difficultés à se repérer dans le temps et dans l’espace, à reconnaître ses proches, elle peut manifester d’importants troubles du comportement, parfois accompagnés d’agressivité ou de tendances paranoïaques, elle présente une perte d’autonomie conséquente et a besoin d’aide pour accomplir des gestes essentiels comme manger, s’habiller ou encore se laver, et montrer une perte de capacités motrices lorsque la mémoire procédurale, celle des savoir-faire et des apprentissages moteurs, est finalement atteinte.

Les risques de décès

À un stade avancé de déclin cognitif, la personne atteinte de « démence » voit son état général se détériorer. La perte motrice engendre souvent des difficultés de déglutition qui, conjointement à l’affaiblissement général de l’organisme et du système immunitaire, favorise l’apparition de maladies opportunistes telle la pneumonie. Ces dernières font d’ailleurs partie des principales causes de décès chez les personnes atteintes de « démence ».

Les causes et les facteurs de risque

Les causes de la « démence » sont multiples et souvent difficiles à identifier. Elle résulte d’un ensemble de maladies et de lésions qui surviennent majoritairement chez les personnes âgées et peuvent être liées à des facteurs génétiques, hygiéno-diététiques, environnementaux et physiologiques.

Les deux formes de « démence » les plus fréquemment rencontrées sont donc associées à la maladie d’Alzheimer et aux complications survenant à la suite d’un accident vasculaire cérébral (AVC). Bien souvent, les personnes atteintes présentent un type de « démence mixte », associant une pathologie neurodégénérative et une « démence » d’origine vasculaire.

Attention : certaines maladies curables comme la dépression, les problèmes de thyroïde, l’abus d’alcool ou l’intolérance à certains médicaments peuvent se traduire par des symptômes similaires à ceux de la « démence ». Dans ces situations, traiter la source des symptômes peut suffire à les faire disparaître, même chez un sujet âgé.

C’est l’une des raisons pour lesquelles il est essentiel que la personne concernée bénéficie d’une attention médicale dès l’apparition des premiers signes.

Traiter la démence (démence sénile)

Le traitement de la « démence » et des maladies neuro-évolutives comme la maladie d’Alzheimer, est un enjeu majeur de santé publique. Il fait l’objet de recherches scientifiques continues. Malgré le travail des chercheurs et les nombreuses avancées qui ont eu lieu au cours des dernières années, il n’existe à ce jour aucun traitement curatif, qui permette de soigner ou même de stopper l’évolution de maladies neuroévolutives.

Les « démences » évolutives avérées font généralement l’objet d’un traitement palliatif et non curatif : on essaye de réduire l’impact de la maladie sur le patient et de préserver au maximum son autonomie et sa qualité de vie. Cela passe par un arsenal thérapeutique dont les composantes varient en fonction du profil de la personne malade : mobilisation cognitive, psychothérapie, thérapie cognitivo-comportementale, activité physique adaptée, traitements symptomatiques…

Lorsque l’altération des fonctions cognitives, comportementales et motrices devient trop importante et que l’entourage de la personne n’est plus en mesure de subvenir à ses besoins, il est souvent nécessaire d’envisager une institutionnalisation en EHPAD ou en maison de retraite spécialisée, de façon ponctuelle (accueil de jour), temporaire ou permanente.

Prévenir la démence

En attendant la mise au point d’un traitement permettant de guérir ces pathologies, la lutte contre les « démences » repose en majeure partie sur la prévention. Cette prévention passe notamment par la promotion d’une bonne hygiène de vie (alimentation saine, arrêt du tabac, réduction de la consommation d’alcool…) et d’une activité physique et mentale régulière.

L’information et la sensibilisation du public aux maladies neuro-évolutives et la mise en place de dispositifs adaptés visant à faciliter le quotidien des personnes malades et de leurs proches aidants sont également les piliers du combat qu’il nous faut mener collectivement contre ces pathologies. Pour rappel, concernant la maladie d’Alzheimer et ses maladies apparentées, plus de 1,2 million de personnes en sont atteintes aujourd’hui en France. Et les estimations actuelles portent ce chiffre à plus de 2,2 millions en 2050.

alzheimer et démence

« Démence », un mot à ne plus utiliser !

Si le monde scientifique emploie évidemment ce terme dans le cadre de différents programmes de Recherche ou pour qualifier le syndrome, certains pays, comme le Japon ou le Canada ont pris la décision de ne plus employer le terme de « Démence » , et ce, pour de multiples raisons. En France, nous ne l’utilisons pas non plus pour désigner les pathologies neuro-évolutives dont sont atteintes les personnes qui vivent avec la maladie d’Alzheimer ou une maladie apparentée. France Alzheimer vous explique pourquoi.

En premier lieu, l’utilisation de ce terme n’est pas reconnue comme nécessaire. Les personnes que nous accompagnons s’identifient davantage comme vivant avec une maladie d’Alzheimer ou une maladie apparentée. Elles distinguent ainsi leur pathologie d’autres maladies neurodégénératives (MND).

D’ailleurs, et c’est une autre raison, la « démence » est un stade de la maladie d’Alzheimer, qui peut ne jamais survenir chez certaines personnes diagnostiquées. Ce stade peut également se retrouver dans de nombreuses autres pathologies cancéreuses ou infectieuses par exemple. La confusion pourrait donc être importante.

Le syndrome « démentiel »

Par ailleurs, le syndrome « démentiel » ne se retrouve pas dans toutes les pathologies dites « neurodégénératives » (MND) comme la maladie de Parkinson ou la sclérose en plaques, alors que les politiques publiques, depuis 2014, utilisent cette notion MND pour désigner la lutte contre ces pathologies. Utiliser le terme de « démence » ne permettrait donc pas de toutes les qualifier correctement.

Sa traduction en anglais par le terme de « dementia » est acceptée de tous en France, monde politique et scientifique et ne pose aucun problème lors des échanges bilatéraux, européens ou internationaux.

Enfin, et c’est l’une des principales raisons pour France Alzheimer et maladies apparentées, le terme de « démence » est encore lourdement associé en France à des représentations négatives. Ces représentations impactent fortement le quotidien des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie apparentée et leurs proches aidants. Officialiser l’utilisation de ce terme pour qualifier les pathologies dont souffrent ces personnes seraient lourd de conséquences. Ceci n’est pas envisageable pour notre Association qui lutte avec force et détermination contre la stigmatisation, les idées reçues et les préjugés.

Ces préjugés, qui ont la vie dure, peuvent empêcher une démarche diagnostique pourtant essentielle. Ils peuvent reporter l’une entrée dans un parcours de soins adapté. Ils peuvent également isoler toute une famille impactée par simple peur du regard de l’autre et de la société. Tout ceci est inadmissible. Nous devons lutter avec force afin que chaque citoyen se responsabilise et afin de favoriser un quotidien plus serein pour les personnes malades et leurs proches aidants, qui, même après le diagnostic, ont encore de nombreuses choses à dire, à faire et à partager, au sein même de la société.

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En conclusion : Changeons nos habitudes face à la maladie !

La première attitude face à la maladie est donc de changer nos habitudes : ne parlons plus de « démence » car si l’on souhaite aider les personnes malades, les accompagner, leur apporter le bon soin, au bon moment… il faut nommer la maladie neuro-évolutive dont elles sont atteintes.

C’est par le biais d’un vocabulaire juste et adapté, que la bonne attitude humaine médicale et médico-sociale pourra être adoptée afin de soutenir au mieux la personne malade et son proche aidant !

C’est par cette démarche de désignation juste, que nous pourrons aider de nombreuses personnes à se tourner vers un médecin, à accéder à une prise en charge médicale le plus tôt possible, à identifier et à traiter une éventuelle maladie curable, à entamer un protocole de soins adaptés pour tenter de ralentir la progression d’une maladie, d’en alléger les symptômes et de préparer l’avenir avec davantage de sérénité et sans se voile de honte qui vient souvent entraver toutes ces étapes.

France Alzheimer et maladies apparentées se bat depuis plus de 35 ans aux cotés des familles pour changer le regard de la société sur la maladie d’Alzheimer et les maladies apparentées, faire évoluer les consciences et faire reculer ces pathologies. Nous comptons sur votre mobilisation à nos côtés.