9 juin 2021
Par-delà vents et marées

Xavier Fabre publie son livre « Alzheimer, un océan pour vous dire. » Le carnet de bord de cet homme ayant traversé l’Atlantique à la rame en 2018 se mêle à des réflexions au sujet de l’accompagnement de personnes malades.

Xavier Fabre, 56 ans, est un passionné de la mer. Au quotidien, il accompagne des patients touchés par la maladie d’Alzheimer. Poussé par sa volonté de communiquer sur ces personnes fragilisées, il relie à la rame le port d’El Hierro (Canaries) à la Baie du Robert (Martinique) et met en évidence les parallèles de ces deux traversées solitaires : naviguer sur l’océan et vivre la maladie d’Alzheimer avec leurs lots d’isolement, de perte des repères, de colère, mais aussi d’illumination intérieure.

« J’ai trouvé beaucoup de similitudes entre mon périple en solitaire et la vie de personnes malades que je rencontrais au quotidien, notamment la solitude, la difficulté à exprimer ses souffrances, mais aussi la capacité de se raccrocher à des moments de grâce, au présent, de les ressentir avec beaucoup d’intensité. », explique Xavier Fabre.

« J’ai été animateur mais je préférais dire accompagnant en institution pendant plus de 15 ans. J’ai bousculé mon organisation pour répondre au premier de tous les besoins : l’écoute. » Et en s’arrêtant, en écoutant une résidente, Hélène, Xavier Fabre a fait une découverte.

« Elle était à un stade avancé de la maladie et ne s’exprimait que par des cris. Quand je suis entré dans sa chambre, j’ai vu une personne marquée par la maladie. Puis, j’ai vu des photos d’elle, rayonnante, avec ses petits- enfants. Elle me regardait avec de l’inquiétude. J’ai planté mes yeux dans ses yeux et il s’est passé quelque chose. Elle s’est engouffrée dans mon regard, elle communiquait avec moi. »

J’ai l’impression qu’elle lisait mes pensées d’apaisement. Cet échange a été très fort. Et il s’est reproduit de nombreuses fois. Ce rendez-vous-là m’a fait prendre conscience que je pouvais me caler à son rythme, sur sa fréquence, pour entrer en contact avec elle, dans son monde. »

Xavier Fabre conte une autre histoire. « Jacques était alité depuis plusieurs années. Son regard était figé au plafond. Du coup, j’affichais des choses au plafond pour entrer en contact avec lui. Puis, un jour, j’ai pris son lit et je l’ai emmené sur la terrasse de l’institution.
Il a senti l’air, vu un ciel breton rempli de contrastes, entendu les mouettes…. Son regard s’est rempli de joie et il a pleuré. Et pour moi, c’était une belle leçon. »

Xavier Fabre a arrêté de travailler en Ehpad. « Ça n’a pas été simple pour moi, mais j’ai remercié les résidents pour ce qu’ils m’avaient donné et j’ai dit aux familles que leurs proches sont capables de donner, de vivre intensément des moments que l’on peut leur proposer. Ils m’ont beaucoup personnellement apporté. » Il souhaite maintenant organiser des conférences basées sur ses messages et son expérience, et aider des aidants et des professionnels.