8 juillet 2021
Focus sur l’aducanumab

L’association France Alzheimer et maladies apparentées, s’appuyant sur l’expertise de son conseil scientifique, accueille l’arrivée du premier traitement d’une cause de la maladie d’Alzheimer avec enthousiasme. Elle souligne toutefois qu’il est important d’attendre une confirmation des bénéfices cliniques de l’aducanumab.

Le lundi 7 juin 2021, la Food and Drug Administration (FDA), soit l’agence américaine délivrant les autorisations de mise sur le marché des médicaments, a annoncé l’autorisation d’un nouveau traitement contre la maladie d’Alzheimer, appelé l’Adulhelm®, produit par le laboratoire pharmaceutique Biogen. Il s’agit du premier médicament autorisé contre la maladie d’Alzheimer depuis l’autorisation de mise sur le marché de l’EBIXA/Mémantine en 2003. C’est donc un renouveau dans l’horizon thérapeutique de la maladie d’Alzheimer et le premier traitement d’une des causes de la maladie.

Historique

La maladie d’Alzheimer est associée à la présence de dépôts amyloïdes dans le cerveau. Une hypothèse développée par les chercheurs est que la suppression des lésions permettrait de ralentir l’évolution de la maladie. C’est pour répondre à cette hypothèse que l’aducanumab a été développé. La molécule ou principe actif de l’aducanumab est un anticorps monoclonal anti-amyloïde dont l’effet est de combattre les formes solubles et insolubles des peptides amyloïdes pour freiner ou réduire les signes cliniques de démence. Le développement de l’aducanumab, nom de la molécule thérapeutique Adulhelm®, est particulier et a déjà fait couler beaucoup d’encre.

L’étude clinique qui repose sur deux essais cliniques (EMERGE et ENGAGE) a été interrompue de façon prématurée à la suite d’une analyse intermédiaire (classiquement réalisée dans ces essais) qui estimait très peu probable qu’un bénéfice clinique puisse être observé à la fin de l’essai. Le laboratoire Biogen a analysé, dans un second temps, l’ensemble des données disponibles, intégrant les données qui avaient été recueillies entre le moment de la réalisation de l’analyse intermédiaire et le moment de la décision d’arrêter l’essai. Cette analyse a montré une diminution de la charge amyloïde dans les deux études. Dès lors, malgré la controverse scientifique, la FDA a approuvé l’aducanumab et a autorisé sa mise sur le marché aux Etats-Unis sur la base de la diminution de la charge amyloïde dans le cerveau. Cette autorisation « accélérée » de la FDA ne vient pas sans condition puisque la FDA réclame un nouvel essai post-approbation pour vérifier l’intérêt clinique du traitement sur une période de 9 ans.

Effets du traitement

Dans l’essai EMERGE, on observe un bénéfice clinique qui se traduit par un moindre déclin cognitif dans le groupe de patients traités à la posologie la plus élevée (dose thérapeutique optimale) de l’aducanumab par rapport au groupe placebo. Cet effet n’est pas retrouvé dans l’essai ENGAGE. Cette contradiction des résultats entre les deux essais cliniques a provoqué la controverse au sein des experts vis-à-vis de l’efficacité de l’aducanumab. Toutefois, il est observé, dans ces deux études, une réduction de la charge amyloïde insoluble mesurée par imagerie.

Il est également important de souligner les effets secondaires observés dans les essais. Près de 35% des patients ayant reçu l’aducanumab ont présenté des microhémorragies cérébrales et des œdèmes cérébraux pouvant entraîner des effets secondaires bénins, comme des maux de tête, des étourdissements, des troubles visuels et des nausées, mais aussi plus graves entraînant des cas avec complication et arrêt du traitement.

À qui s’adresse le traitement ?

Ce traitement s’adresse à des patients atteints d’une maladie d’Alzheimer à un stade précoce, au stade prodromal ou léger, avec la présence avérée de dépôts amyloïdes au niveau cérébral. Il est important de noter que le traitement nécessite une perfusion mensuelle, une augmentation progressive des doses et un suivi régulier par imagerie (IRM) pour détecter des effets secondaires potentiels.

Au regard du caractère contraignant du traitement et des bénéfices cliniques encore débattus, il sera nécessaire d’évaluer systématiquement la balance bénéfice/risque lors du recours à ce médicament.

Enfin, la FDA n’ayant autorité que sur le territoire américain, il faut attendre la décision de l’Agence européenne du médicament qui donnera son avis sur la recevabilité du traitement en Europe, d’ici la fin de l’année 2021. Ensuite, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé se prononcera sur l’autorisation d’utilisation de l’aducanumab pour la France.

En résumé

L’association France Alzheimer et maladies apparentées, s’appuyant sur l’expertise de son conseil scientifique, accueille l’arrivée du premier traitement d’une cause de la maladie d’Alzheimer avec enthousiasme. Cependant, il est essentiel d’attendre une confirmation des bénéfices cliniques de l’aducanumab. Soulignons également qu’il ne s’agit pas d’un traitement permettant de guérir la maladie d’Alzheimer, mais d’un traitement qui agit sur l’un des processus de la maladie.

Ce nouveau traitement étant plutôt destiné aux stades précoces de la maladie, France Alzheimer rappelle l’importance de continuer la recherche dans les phases plus avancées de la maladie d’Alzheimer.

Il est important de souligner également le coût potentiel du traitement. Aux Etats-Unis, le coût de ce médicament est très élevé, comme pour de nombreux médicaments innovants. En cas d’approbation en France, l’association veillera à ce que ce nouveau traitement ne soit pas à l’origine d’un renforcement des inégalités d’accès aux soins et à l’innovation pour les patients atteints de maladie d’Alzheimer sur l’ensemble du territoire.

Ce nouveau médicament marque une nouvelle étape dans la lutte contre la maladie d’Alzheimer. La mise sur le marché de l’aducanumab permet de relancer la recherche sur la maladie d’Alzheimer et pourrait, nous l’espérons, ouvrir la voie à d’autres molécules prometteuses actuellement en cours de développement dans le monde, y compris en France.