12 février 2020
Les relations sociales sont-elles un facteur protecteur de la maladie ?

Archana Singh-Manoux a travaillé sur le vieillissement cognitif en étudiant la cohorte britannique Whitehall II, qui suit plus de 10 000 personnes depuis 1985.

Épidémiologiste, professeur à l’University College de Londres et directrice de recherche à l’Inserm, Archana Singh-Manoux a fait du vieillissement cognitif le cœur de ses recherches.

« Le déclin cognitif est une diminution des capacités à traiter de l’information, à raisonner, à se souvenir ou à s’orienter dans l’espace », explique Archana Singh-Manoux, avant d’enchaîner : « À quel âge commence-t-il ? C’est une question difficile. Des résultats récents montrent qu’il existe bien avant 65 ans et peut même commencer à partir de 45 ans, mais pas chez tout le monde. »

Les chercheurs travaillent sur les facteurs de risque qui favorisent le déclin cognitif et peuvent conduire à développer une maladie d’Alzheimer ou une maladie apparentée, mais aussi sur les facteurs qui l‘empêchent, le retardent ou le ralentissent, comme les relations sociales.

Archana Singh-Manoux a travaillé sur ce sujet en étudiant la cohorte britannique Whitehall II, qui suit plus de 10 000 personnes depuis 1985. « Au début, l’idée de cette cohorte était d’étudier les maladies cardiovasculaires. Je suis arrivée dans cette étude il y a 20 ans et je me suis dit qu’il était intéressant de regarder également le fonctionnement cognitif. Nous avons alors monté la partie de cette étude que j’ai dirigée. Et comme nous avons eu des personnes qui ont développé des maladies d’Alzheimer et apparentées, nous avons repris les données sur les interactions sociales des participants à l’étude pour déterminer si elles avaient eu un effet protecteur. »

En comparant la fréquence des troubles cognitifs chez les personnes ayant les interactions sociales les plus importantes avec celles étant les plus isolées, cette étude, parue sur le site scientifique en ligne PLoS, a révélé que les relations sociales réduisent de 12 % le risque de développer la maladie d’Alzheimer ou une maladie apparentée. Mais ce n’est pas parce que l’on a beaucoup d’amis que la maladie n’apparaîtra pas. « C’est un petit effet positif. Il y a quelque chose… La question serait : est-ce que le risque de développer la maladie changerait si on modifiait la qualité des interactions sociales de quelqu’un ? Ça, c’est impossible de le dire. »

Mais Archana Singh-Manoux poursuit ses travaux, notamment dans le but d’établir « des preuves plus solides » de l’importance des relations sociales dans la lutte contre le déclin cognitif et les maladies d’Alzheimer et apparentées.

Archana Singh-Manoux est également impliquée dans la partie consacrée au vieillissement cognitif de la cohorte française Constances. Cette cohorte constituée de 200 000 personnes, dont l’Inserm est partenaire, a été créée il y a 5 ans. Il faudra donc attendre quelques années voire quelques décennies avant d’avoir des résultats concernant le déclin cognitif de ses participants.