17 février 2020
Des liens entre surconsommation de sucre et maladie d’Alzheimer ?

Chercheuse épidémiologiste à l’Inserm, Sylvaine Artero mène un projet de recherche sur les liens entre consommation de sucre et maladie d’Alzheimer.

L’alimentation est au cœur de toutes les attentions quand on parle de maladie. Le sucre, ou plutôt l’excès de sucre, est notamment pointé du doigt pour plusieurs pathologies.

Sylvaine Artero, chercheuse épidémiologiste à l’Inserm, mène un projet de recherche sur les liens entre consommation de sucre et maladie d’Alzheimer. Un projet soutenu depuis 2017 par l’association France Alzheimer et maladies apparentées.

« Nous savons que la nutrition est importante dans la maladie d’Alzheimer. Cette maladie est notamment la résultante d’une dynamique de facteurs de risque. Nous nous sommes intéressés à la consommation des sucres parce qu’elle est très récente dans l’histoire de l’Humanité. Le sucre est aujourd’hui très accessible, sa consommation est excessive dans les pays occidentaux et cela contribue à différentes pathologies. On sait que l’excès de sucre est associé aux pathologies cardiovasculaires, aux lésions vasculaires-cérébrales. Et on pense de plus en plus aujourd’hui que cette consommation excessive de sucre pourrait avoir un impact sur le cerveau, sur les capacités cognitives, et peut-être même sur la survenue de la maladie d’Alzheimer. »

Cette surconsommation de sucre favoriserait l’accumulation du peptide bêta-amyloïde autour des neurones.

Des liens entre surconsommation de sucre et troubles cognitifs chez les enfants et les jeunes adultes ont, en tout cas déjà, été établis, comme le souligne Sylvaine Artero. « On sait par exemple qu’une alimentation riche en saccharose dans la petite enfance va impacter la mémoire et les capacités d’apprentissage. Cela ressort d’une étude menée par l’université d’Harvard publiée l’année dernière. On sait aussi qu’une alimentation trop riche en sucre chez les femmes enceintes va impacter les fonctions cognitives de leur enfant plus tard. Et chez les personnes âgées, une étude épidémiologique aux Etats-Unis a pu montrer qu’il y avait un lien entre une consommation élevée de soda et les fonctions cognitives. Mais cette étude était transversale et elle n’était donc pas inscrite dans le temps, dans la durée. »

C’est là tout l’objet du travail du Dr Artero : un travail dans la durée. « Nous menons actuellement des études épidémiologiques pour prouver ce lien entre consommation d’aliments à charge glycémique élevée et survenue de troubles cognitifs et de la maladie d’Alzheimer. Nous travaillons dans l’étude des Trois cités, qui est une étude épidémiologique de près de 10.000 personnes âgées. Et au départ de cette étude, nous avons mené une enquête alimentaire qui nous permet d’évaluer ce lien sur une durée de 15 ans. Les participants ont également pu bénéficier d’une IRM cérébrale dans le cadre de cette étude. Nous allons donc pouvoir étudier l’impact du sucre sur la structure et le fonctionnement du cerveau. »

Le Dr Artero et son équipe se penchent également sur l’étude du microbiote, afin de « savoir quel sera l’impact du sucre sur ce microbiote puis sur les fonctions cognitives ».

Sylvaine Artero indique que des premiers résultats « très intéressants » seront bientôt publiés, avant de lever une partie du voile. « Ces résultats montrent que consommer des aliments avec une charge glycémique élevée est un vrai facteur de risque de maladie d’Alzheimer. »

Cela ne veut pas dire qu’il faut arrêter de manger du sucre. Il faut juste modérer sa consommation.