22 mars 2024
Cerveau, vieillissement et adaptation

Des scientifiques ont découvert les preuves les plus solides à ce jour que notre cerveau peut compenser la détérioration liée à l’âge en recrutant d’autres zones pour aider à maintenir les performances cognitives.

En vieillissant, notre cerveau perd peu à peu des cellules nerveuses et des connexions, ce qui peut entraîner un déclin de certaines fonctions cérébrales. Cependant, toutes les personnes ne présentent pas de troubles cognitifs en vieillissant, ce qui laisse supposer qu’un mécanisme méconnu semble être capable de préserver les fonctions cognitives. L’hypothèse la plus répandue est que le cerveau de certaines personnes est capable de compenser la détérioration du tissu cérébral en recrutant d’autres zones du cerveau pour aider à accomplir les tâches. Même si certaines études d’imagerie ont montré que le cerveau était capable de recrutement, il n’était pas clair, jusqu’à présent, si cela améliorait réellement la performance des individus.

Une équipe dirigée par des scientifiques de l’Université de Cambridge (Royaume-Uni) en collaboration avec l’Université de Sussex (Royaume-Uni) a toutefois montré que, lorsque le cerveau recrute d’autres zones, il améliore spécifiquement les performances chez les personnes âgées.

En effet, leur étude a permis de découvrir que les tâches dites « d’intelligence fluide », c’est-à-dire la capacité que nous avons à résoudre des problèmes abstraits, engagent un réseau cérébral appelé « réseau à demandes multiples » (RDM). Ce réseau implique à la fois des régions du cerveau situées à l’avant et à l’arrière du cerveau, mais son activité diminue naturellement avec l’âge. Pour observer si le cerveau était capable de compenser cette activité, l’équipe de recherche a examiné les données d’imageries de 223 adultes âgés de 19 à 87 ans. Les volontaires ont été invités à identifier les intrus dans une série de casse-têtes avec différents niveaux de difficulté, tout en étant allongés dans un scanner d’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf). Cette expérience a permis aux chercheurs d’étudier les schémas d’activité cérébrale en mesurant notamment le changement de flux sanguin.

Les chercheurs ont ainsi pu observer, qu’en général, la capacité à résoudre les problèmes diminuait avec l’âge. Cependant, ils ont trouvé deux zones du cerveau qui montraient une activité plus importante chez les personnes âgées, corrélées à de meilleures performances. Ces deux régions se trouvent à l’avant du cerveau, dans une partie du cortex frontal, et à l’arrière du cerveau, appelée le cuneus. C’est cette partie, impliquée notamment dans le traitement visuel et d’autres fonctions cognitives liées à la vision, qui est responsable de l’amélioration des performances.

Ces résultats soulèvent beaucoup de questions. Le responsable du projet a annoncé la nécessité de comprendre la raison pour laquelle ce type de compensation ne se met pas systématiquement en place et s’il est possible de recréer les effets observés dans cette étude chez tous les individus.

Sources:

Ethan Knights, Richard N. Henson, Alexa M. Morcom, Daniel J. Mitchell, Kamen A. Tsvetanov. Neural Evidence of Functional Compensation for Fluid Intelligence in Healthy Ageing. eLife (in press), 2024 DOI: 10.7554/eLife.93327.1